Oui, il y a encore des poissons dans la mer. C’est de plus en plus étonnant et ça ne va pas s’arranger. C’est un peu pour ça que les réserves naturelles existent : tenter de créer des zones protégées où la vie marine peut essayer de se refaire une santé. L’expérience montre que dans de nombreux endroits, les réserves sont justement des lieux intéressants pour la pêche frauduleuse car là, au moins, il y a encore quelque chose à prélever. Mais il n’y a pas que les actes volontaires qui peuvent occasionner des ennuis aux poissons.
D’habitude, durant l’été, la plongée au Cap l’Abeille c’est plutôt ça :
On aime bien venir tourner autour de cette arête rocheuse. Les poissons y sont souvent en nombre : mérous, loups, sars tambours, dentis, barracudas, sars communs et à museau pointu, saupes, oblades, castagnoles…
Alors, quand on descend un matin et qu’on tombe sur ça :
Ça ne fait pas très plaisir. Heureusement, les poissons avaient pris leurs distances. Ce filet dérivant est venu s’accrocher à cette roche, en retombant de part et d’autre sur une longue distance. D’où venait-il ? Il était bien propre. Après signalement aux autorités, il a été rapidement enlevé.
Du Roland Isabelle, coulé à la limite de la réserve, il ne reste pas grand-chose, mais un pas-grand-chose complètement recouvert de lambeaux de filets à 40 m de fond. Tous les jours, des filets sont largués au plus près des roches, voire sur les sites de plongée où sont posées les bouées des mouillages fixes (voir Mépris ). Pourquoi ?
En d’autres lieux exotiques francophones, certains ne trouvent pas mieux que d’accuser une réserve naturelle d’attirer les prédateurs. Il est anormal de ne pas pouvoir aller se baigner dans une mer où il devient presque scandaleux que l’écosystème naturel survive malgré tout ce qu’on peut faire pour le massacrer. Il y a des poissons carnivores, c’est inadmissible !
Plus proche de nous, dans cette bonne vieille Mare Nostrum, selon un article paru dans l’Indépendant cette année, il paraît que les thons sont à présent si nombreux qu’ils privent les pêcheurs de leur gagne-pain. C’est bien connu, les populations de thons en Méditerranée sont si importantes et si voraces que l’on peut les pêcher sans crainte d’extinction... Quant à la grande cigale, espèce menacée réglementée depuis 20 ans, on peut encore la trouver en vente localement, c’est-à-dire qu’elle ne vient pas du Pacifique…
Il est dur de se demander pourquoi. Ça oblige à se poser des questions qui suggèrent des hypothèses désagréables. Ce qui est sûr, c’est que quand il n’y en aura vraiment plus, ça sera définitif, pour tout le monde.