On le répète souvent, les conditions sur épave peuvent changer très rapidement. La veille, la visi sur l’Astrée était seulement brouillée par un troupeau de sangliers. On aurait presque regretté que la chasse avec scaphandre soit interdite… Le lendemain matin, les conditions sont différentes, plutôt glauques. Le haut du château baigne dans une atmosphère fantomatique.
A l’étage en dessous, c’est carrément sombre. Je vois Ramoucho suivre son guide de palanquée dans un recoin obscur…
La nuit dans la salle des machines aurait pu jeter un voile pudique sur les événements, mais malgré les conditions de lumière et de visibilité, mon appareil a capté une scène qui pourrait être diversement interprétée…
Ramoucho, les mains croisées, ne manifeste aucune réaction négative. Mais était-il encore tout à fait conscient ?
Et il y a plus encore ! Mais pour bien voir, il faut l’image non censurée. Je demande aux lecteurs sensibles de passer directement à la suite.
Un phénomène étrange reste pour moi inexpliqué : Ramoucho fume de la tête ! Ce ne sont pas ses bulles, ni celles de son partenaire. Expression ectoplasmique d’une plénitude azotée ?
Je passe sur la visite des cales arrière car j’ai raté les photos compromettantes.
A mesure que nous avançons vers la poupe, la touille s’épaissit. Au passage, je distingue ce qui est peut-être le reste de la croix du mât de charge arrière, puis les gros treuils des cales.
Le gaillard d’arrière n’est pas très surélevé par rapport au pont. A son approche, émergeant de la couche de brouillard plus épais, une tête au bout d’un long cou nous fait face. Un cousin de Nessie ?
C’est une sorte de bossoir, solitaire. Je ne sais pas ce qu’il devait relever, ou abaisser.
Au milieu de la dunette subsistent les restes de ce qui devait être le mécanisme d’action de la barre.
Nous passons par-dessus bord pour descendre le long de la coque. Malgré le brouillard et la baisse de luminosité, on peut constater que la poupe est bien conservée. Sous la courbure très prononcée, le gouvernail et l’hélice sont bien là. L’espace entre l’hélice et le safran est assez large pour que les plongeurs puissent y passer.
Le contre-jour permet de distinguer le safran de l’étambot sous la courbure de la poupe.
Nous regagnons le pont, mais il en manque un… Devant nous s’élève une colonne de bulles et de touille remuée bien épaisse : c’est Ramoucho qui doit faire le sanglier dans la vase 5 ou 6 mètres plus bas. Quelques secondes plus tard, telle Vénus sortie des eaux, il émerge au milieu de ce panache crasseux. Tout va très bien, il a le sourire.
Nous regagnons l’angle bâbord arrière du château où est fixé le bout de balisage. On a pris notre temps et à ces profondeurs… La lente ascension commence mais à peine quelques mètres plus haut, entendant marmonner dans le détendeur, je suis du regard la direction indiquée par la main semblant dire « non mais regarde ça ! »
Accroché par les mollets, palmes croisées, allongé la tête en arrière, Ramoucho fait des bulles ! No stress ! Cooooool !
On mettra ça sur le compte de la somme des émotions vécues lors de cette plongée en eaux troubles dans un lieu glauque. A mon avis, il a aimé !
Une prochaine fois, je montrerai l'Astrée sous un meilleur jour, avec des sangliers...